Présidentielle 2007 et Finances – Paru le 14 février 2007, puis le 28 mai 2009

Deux visions majeures s’affrontent et s’opposent :

L’une, celle de Sarkozy, coûterait environ 30 milliards, l’autre, celle de Royal, aux alentours de 35 milliards selon François Hollande.

Nicolas Sarkozy :

• – Augmenter le budget de l’enseignement supérieur de 50% et porter l’effort de recherche à 3% du PIB en cinq ans: 10,2 milliards d’euros
• – Exonérer de charges sociales et d’impôts toutes les heures supplémentaires: 4,6 milliards d’euros
• – Abaisser le bouclier fiscal à 50% et déduire de l’ISF les sommes investies dans les PME (jusqu’à 50.000 €): 4 milliards d’euros
• – Exonérer 95% des Français des droits de succession: 5 milliards d’euros
• – Abaisser à 5,5% le taux de TVA dans la restauration: 2,5 milliards d’euros
• – Relever le niveau des indemnités chômage pour les bas salaires: 1,8 milliard d’euros
• – Créer un service civique: 3,1 milliards d’euros
• – Améliorer les retraites des femmes ayant cessé leur activité professionnelle pour éduquer leurs enfants: 1,8 milliard d’euros

Ségolène Royal :

• – Mettre en place un revenu de solidarité active: 6 milliards d’euros
• – Créer une allocation d’autonomie pour les jeunes: 7 milliards d’euros
• – Créer une carte santé jeune : 70 millions d’euros
• – Relever à 500 000 le nombre des "emplois-tremplins: 6 milliards d’euros
• – Créer un droit au premier emploi pour tous les jeunes qualifiés: 1 milliard d’euros
• – Offrir aux jeunes l’accès à un prêt gratuit de 10 000 euros: 2,1 milliards d’euros
• – Augmenter de 10% pendant 5 ans le budget de la recherche: 7 milliards d’euros
• – Construction de 120.000 logements sociaux: 200 millions d’euros
• – Créer un service public de la caution pour les locataires: 500 millions d’euros

Outre que ces chiffres me laissent rêveur, ils suscitent chez moi un reflexe quasi pavlovien, l’envie irrepressible de poser trois questions :
– Où trouver cet argent ?
– Pour faire quoi ?
– Pour quelle rentabilité ?

I – Où trouver cet argent ?

J’entends sans cesse dire, dans la presse, dans les médias, dans la rue, au café du coin, que la France est un pays riche. Ma foi, si l’on considère que la Californie avec 34 millions d’individus, contre 63 pour la France a un PIB supérieur, qu’elle affiche un taux de croissance de 3,8%, et que l’on continue à se regarder le nombril… S’il l’on considère le nombre de Français dans cette liste : http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_milliardaires_du_monde_en_2006 … On peut faire « cocoricooooo » !

L’un de mes amis s’est installé à Abu-Dhabi il y a six ans. Chaque année, lorsqu’il revient passer son mois de vacances, il me répète la même chose en riant : « ici, c’est le moyen âge ! ». Voilà qui fait plaisir ! Contrairement à l’idée répandue, la France n’est pas si riche qu’on veut nous le faire croire. Nous sommes une petite nation sur le globe, et si nos partenaires nous font aujourd’hui l’honneur de nous écouter, c’est bien pour ne pas nous vexer. Car , disons-le, la France occupe aujourd’hui dans le monde politique une place qu’elle ne mérite plus.

Alors où trouver cet argent ? Dans nos poches ? Parce que ce ne sont pas nos voisins qui financeront cela, si l’on considère déjà la dette extérieure… Eh bien oui, dans nos poches. Remarquez, moi je m’en fous, je n’ai rien à donner. Je dis toujours que l’argent qui n’est pas dans ma poche est dans celle d’un autre. Je m’en réjouis pour lui : c’est lui qui va trinquer !

2 – Pour faire quoi ?

J’entendais l’autre jour un Sarko-narquois dire que Ségolène Royal ne propose que de l’assistanat, tandis que lui investit. C’est vrai qu’il investit… Dans les radars ! A dire vrai, je ne vois pas en quoi les décisions de Royal ne seraient pas aussi de l’investissement.

Pour moi, l’idée d’investissement est indissociable de celle de production . Non pas une production au sens industriel ou marchand, mais une production en terme d’effet, de résultat. Si nous consacrons une certaine somme à une action, c’est parce que nous en attendons un effet. Et à l’évidence, chaque proposition de chaque candidat a son effet propre.
La question est de savoir si ces effets vont générer de la richesse supplémentaire pour le pays ou pas… Et là, j’ai comme un doute…

Je voudrais illustrer cette idée par un exemple, parce que j’ai l’impression de n’être pas clair dans mon propos :

Je parle des « Radars de Sarkozy », entre guillemets, parce que j’érige cette action comme un archétype de l’action politique en France.
En fait, ce qui m’intéresse n’est pas le radar lui-même, mais le principe qu’il sous-tend :
Le radar crée un flux financier de la France d’en bas vers la France d’en haut. Déplacement vertical d’une somme colossale d’euros, de la masse vers le sommet. Ce sommet dispose donc d’un apport qu’il peut utiliser à son gré, en choisissant soigneusement les chemins par lesquels cet argent peut « retourner » vers la base. Sans oublier, bien sûr, de se servir au passage. Il crée ainsi un véritable « cycle », une rotation d’un flux financier qui n’a pas d’autre effet que d’exister en tant que tel.
La réalité de ce courant financier est qu’il ne produit rien.

Je cite:« Pourquoi la Sécurité Routière affirme-t-elle que les résultats de l’étude menée par ses experts démontrent que 75% des vies épargnées en 2003, 2004 et 2005 sont dues à la mise en place des radars automatiques ? Ce qui est impossible et elle ne peut pas l’ignorer, puisque 67% des vies épargnées l’ont été en 2003 avant l’implantation des radars. ».
(in : http://www.40millionsdautomobilistes.com/Data/Dossiers/actions/125/392.asp ) Lettre restée, bien sûr, sans réponse…

Et c’est bien là le reproche que je fais aux programmes de nos gouvernements successifs depuis trente ans. Ils créent des cycles de rotation financières qui ne produisent rien, qui n’apportent aucune richesse au pays. Ces flux n’ont d’autre utilité que d’exister pour eux-mêmes, de façon stérile pour la nation.
En clair, pour moi, un « Radar de Sarkozy » décrit un cycle financier stérile, qui ne produit pas de richesses, et qui n’a d’autre utilité que de brasser de l’argent pour « opacifier » l’utilisation des finances publiques.

3 – Pour quelle rentabilité ?

Ici se situe l’enjeu véritable de la dépense. Qu’un programme décrive une action et ce qu’elle coûte est une chose. Qu’il exprime en termes objectivables les résultats qu’on en attend en est une autre (Un terme objectivable étant une mesure statistique qualifiable et quantifiable).

Or, encore une fois, la question que je pose est simple :
Messieurs et Mesdames les candidats, quelles richesses pensez vous que vos programmes respectifs vont apporter à la nation ? En quoi ces programmes vont-ils permettre le desendettement de la France ? Quelle croissance espérez vous de vos mesures ? En quoi vos mesures vont-elles permettre de stopper la paupérisation progressive de notre pays ?

J’arrête là cette litanie, je pense que chacun comprend le souci que je soulève.
Pourquoi parler de paupérisation ? Je fais ici référence à une idée simple, celle des coûts de non qualité :
Si je produis un bien qui me coute 20 euros à la production, produit que je compte vendre 40 euros, et que je rate mon objectif, combien cela me coûte t –il ? Réponse : 20 euros de production + 40 euros de mévente = 60 euros. En clair, le coût de ma non-qualité a fait perdre à l’entreprise non pas 20 mais 60 euros.
Perte dont les deux tiers auraient du être de la richesse apportée de l’extérieur

Si je présente maintenant un train de mesures qui coûte 30 milliards d’euros à la nation, et que je rate mes objectifs, combien cela coûte t-il au contribuable ? Vu sous cet angle, il me semble que les électeurs sont en droit d’attendre des candidats autre chose qu’une polémique d’idées ou de partis.

Pour conclure :

Si j’ai un salaire de 10.000 euros par mois, alors je peux m’acheter le superflu sans me poser la question de savoir si cet achat est utile ou non.
Si mon salaire est le smic, alors c’est l’essentiel que je devrai hiérarchiser dans mes dépenses.
Gérer le pays « en bon père de famille » c’est placer la finance publique dans le deuxième cas de figure. A l’échelle mondiale le PIB de la France, c’est un petit smic..

PapyCool

Ps: Cet article paru sur plusieurs blogs politiques le 31 Janvier 2007 a été censuré dans les semaines qui ont suivi les Présidentielles. En réponse à cette censure, j’ai promis de le rééditer autant de fois que nécessaire, sur autant de blogs que nécessaire, à des fins pédagogiques.

Ce contenu a été publié dans Présidentielles 2007. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


*